Tribune libre

Bientôt une nouvelle loi sur l’immigration?

Si on parlait d’autre chose?

C’est reparti ! En pleine crise économique, pour tenter de faire oublier les conflits sociaux qui ne sont pas terminés, on remet l’immigration sur le devant de la scène médiatique et politique.
« Vous reprendrez bien un petit projet de loi ? » On oublie bien vite les milliers de morts en Méditerranée et les motifs de leur départ : l’environnement dégradé, la misère, l’oppression, la guerre. On ne retient que le pseudo « intérêt national » ; on oppose les étrangers (les pauvres, bien entendu) aux natifs, comme s’il y avait un réel danger pour nos vies.

On agite la peur et l’égoïsme. On en nourrit les fantasmes. Dans un climat délétère. Ainsi le maire de Saint-Brevin-les-Pins démissionne après avoir été très violemment agressé avec sa
famille par des militants d’extrême droite pour avoir hébergé un centre d’accueil de demandeurs d’asile. Le responsable national d’un parti de droite s’empresse de déclarer, juste après l’attaque d’Annecy, sans doute pour gagner les électeurs de l’extrême droite, que les agresseurs ont toujours le même profil (entendez : « ce sont des Arabes »). Pas musulman en tout cas cette fois-ci : le Syrien chrétien déséquilibré n’a-t-il pas crié « Au nom de Jésus !» ?

Et tant qu’on parle d’immigration, on ne traite pas des problèmes essentiels. On prétend, à ce prix, ressouder notre société ?!!!

Les arguments qui s’afficheront dans certains médias et, hélas, souvent sur les bancs de l’Assemblée nationale, on les connaît : les immigrés prendraient le travail des Français. Ils seraient à l’origine de l’insécurité. Un jour ou l’autre ils remplaceraient les natifs et repeupleraient la France ! Bref, les empêcher de venir serait un devoir.

Répétons ici ce que nous avons déjà dit sur ce site. Nous le ferons autant de fois que nécessaire.

Les migrants ne nous prennent pas notre travail.

Selon « Alternatives économiques », pour ne citer qu’eux, la concurrence effective entre immigrés et non-immigrés reste très limitée. Les immigrés acceptent généralement des emplois que les locaux ne veulent plus occuper. En témoigne la segmentation très poussée du marché du travail français : les immigrés sont proportionnellement deux à trois fois plus nombreux que les Français de naissance à travailler dans l’hôtellerie-restauration, dans le nettoyage et la sécurité ou encore chez des particuliers.

Y compris au sein de ces secteurs, les métiers sont très cloisonnés. Ainsi, dans la construction, les hiérarchies professionnelles ont tendance à s’organiser par rapport à l’origine des salariés. En réalité, ce sont les immigrés eux-mêmes qui ont le plus à craindre de l’arrivée de nouveaux immigrés car la concurrence se joue essentiellement entre eux.

Contre toute attente, l’impact de l’immigration sur l’économie française et le niveau de vie moyen en France est même positif. L’immigration tend à renforcer la croissance économique, notamment en soutenant l’activité de secteurs essentiels (ne parle-t-on pas de métiers en tension ?) et en augmentant significativement le niveau d’emploi. Enfin, les immigrés qui travaillent contribuent à payer nos retraites. Et ils seraient bien plus nombreux à y contribuer si on les autorisait à travailler à leur arrivée. Ils en ont l’envie et l’énergie, mais le système les pousse à la dépendance ou à se mettre en marge.

L’immense majorité d’entre eux ne menacent en aucune manière l’ordre public.

Pense-t-on sérieusement que tous les musulmans (car c’est bien à eux que les médias pensent le plus souvent quand ils parlent de « migrants ») seraient islamistes et que seuls les étrangers commettent les attentats terroristes ? Quand bien même on fermerait les frontières, les criminels intégristes s’insinueraient sur le territoire, s’ils le décidaient, ou téléguideraient leurs attentats. Doit-on refuser l’asile à tous ou au plus grand nombre afin d’éviter les rares criminels qui mettent en avant une idéologie irrationnelle pour mieux opprimer ?

Les immigrés ne seront jamais sur le point de remplacer la population française.

L’argument du « grand remplacement » serait à mourir de rire s’il n’était pas facteur de haine et de régression. Même si l’on gonfle à l’excès les chiffres de l’immigration clandestine (par définition impossible à évaluer), l’immigration en France est marginale. Très marginale. Et même si, à l’avenir, l’État ne la contrôlait pas, nous serions loin d’être submergés… Notre association héberge depuis trois ans des immigrés. Nous affirmons qu’ils n’abandonnent pas leur famille et leurs amis sur un coup de tête, ou pour profiter du système à nos dépens. Ceux qui ont bénéficié ou bénéficient de notre accueil ne demandent qu’à vivre et à s’intégrer. Ils ont besoin de notre soutien.

Loin des manœuvres politiciennes, ne laissons pas la division et la haine s’installer dans cette période agitée, qui est troublée par bien d’autres facteurs que la demande d’asile. Rejoignez une association qui vient en aide aux migrants et, si vous habitez en Belledonne, la nôtre.

Daniel Stissi
Membre d’Un toit en Belledonne
Le 15 juin 2023

Sources 

Le Courrier international :https://www.courrierinternational.com/article/2010/12/02/les-tres-bons-comptes-de-l-immigration#:~:text=Les%2520immigrés%2520sont%2520une%2520excellente,an%2520et%2520paient%2520nos%2520retraites

« Les immigrés sont une très bonne affaire pour l’économie française: ils reçoivent de l’État 47,9 milliards d’euros, mais ils reversent 60,3 milliards. Autant dire un solde positif de 12,4 milliards d’euros pour les finances publiques, qui ne représente pourtant que la part monétaire de transferts bien plus importants. »

Vie Publique: https://www.vie-publique.fr/en-bref/287990-immigration-les-chiffres-pour-2022

La Cimade:  https://www.lacimade.org/asile-en-france-premier-bilan-2021/ 

Alternatives économiques:  https://www.alternatives-economiques.fr/thematiques/immigration